Sidney - dream walking

Il n'a pas souvenir de la dernière fois qu'on lui a demandé de parler de son passé. Ça lui semble si loin qu'il prend une grande inspiration et se redresse pour s'avachir dans le coussin qui se trouve dans son dos. Il expire doucement, le regard vide à la recherche de ses souvenirs qu'il n'est pas sûr de l'exactitude. Ça remonte à si loin... Il se souvient des choses importantes, mais les choses comme ses parents, sa petite enfance... C'est loin, si loin... Il se racle la gorge et lève ses yeux sur le mec face à lui, entouré de ses gardes du corps. Il est parfaitement en confiance. Même si plusieurs fois, on a attenté à sa vie. Il a su s'entourer dès son plus jeune âge. Et si les fragments de sa vie sont vagues, il connaît le moindre détail des leurs. « Par quoi voulez-vous commencer ? » L'homme se tient parfaitement, droit, un crayon et du papier entre les mains. Lui n'est pas serein. Faut dire qu'il y a de quoi vu les deux malabars de chaque côté de ses épaules. « Et bien, où êtes vous né. Comment étaient vos parents et vous, comment étiez-vous enfant ? » Sidney sourit. Oui, il sourit tout en secouant un peu la tête de gauche à droite. « Je suis né dans la rue, je peux même vous dire que c'était en face du vieux Manfred, le vendeur de petit jouet pour enfant. Je ne sais même pas s'il est encore vivant ce vieux bougre.. » Il rigole en ce disant qu'il y a un moment qu'il n'est pas allé dans la rue des commerces. Mais c'est souvent devenu trop dangereux pour lui, surtout seul. Il réfléchit un peu et secoue la tête en se disant qu’il vient de dire une belle connerie. « Nan, il ne doit plus être de ce monde. Il était déjà proche de la fin quand j’étais gosse. J’ai soixante-sept ans aujourd’hui alors il ne doit plus être là. Vous savez s’il est encore là ? » Il fait un signe de tête au gars en plantant ses yeux d’un bleu limpide sur lui. Sidney serait presque nostalgique si ça avait été une époque de sa vie qu’il avait aimé. Si ça avait été le cas, il en aurait gardé plus de souvenir… L’homme lui fait signe que non, de la tête. Ouais… Il s’en doutait un peu… « Ma mère m’a mis au monde en pleine rue, bien qu’elle a eu l’intelligence de faire ça a l’abri des regards. J’étais là, aussi nu qu’un vers sur les dalles froides et humides de la rue commerçante quand mes premiers pleures on attiré l’attention de quelques passants. Il parait même que j’étais à deux doigts de rendre mon dernier souffle quand on m’a enfin couvert pour me réchauffer. » Il rigole à nouveau en pensant au sacré morceau qu’il est aujourd’hui, mais encore plus au nombre de fois ou il a finalement échappé à la mort. « J’ai été placé dans un orphelinat et à l’âge ou j’ai été assez fort pour aider à la force de mes bras à moindre coût. Un vieil homme m’a adopté pour que je reprenne son commerce, n’ayant ni femme ni enfant, il avait misé sur un gamin qui serait sûrement content d’avoir un avenir. Seulement, il avait misé sur le mauvais cheval.. » Le blond claque des doigts et cela suffit pour que l’un de ses hommes lui apporte une cigarette. Il la glisse entre ses lèvres et le goût du tabac s’imbibe déjà de sa salive. D’un geste franc, la flamme lèche aussitôt l’extrémité et il tire dessus pour qu’elle s’embrase plus rapidement. La fumée qui s’infiltre aussitôt dans sa gorge descendant jusqu’à ses poumons. Il sourit à nouveau, satisfait de la cancerette qui soulage les manques de son corps. « Vous en voulez une ? » Demande t-il finalement en regardant le jeune homme face à lui, qui hoche la tête et Sidney fait un signe de tête à son homme de main qui vient de lui fournir sa drogue quotidienne. « J’suis désolé, j’fume que des sans filtre. » Les filtres ce n’est que pour les gamins qui font semblant de fumer à son sens. « Donc ce que faisait votre père ne vous plaisez pas ? » Sidney inspire encore une taffe de sa cancerette avant de recracher la fumée dans un parfait cône blanc au-dessus de sa tête, celle-ci légèrement penchée en arrière. « C’est pas que j’aimais pas ça, mais voyez-vous, l’orphelinat m’a ouvert les yeux sur une chose dont j’étais sûr dès que j’ai été en âge de pouvoir penser par moi-même. Il était hors de question que je me tue au travail comme cet homme pour ne quasiment pas gagner ma vie. Je savais très tôt que peu importe le moyen que j’utiliserais, j’irais au sommet pour vivre de l’autre côté du mur, pour vivre dans le nord. » Et finalement, ça lui a donné à lui aussi la possibilité de voir ce qu’il y avait de l’autre côté des barrières, parce que ce n’est pas avec son petit boulot de journaliste de rue, qu’il arriverait à pouvoir venir vivre ici. Il le voit comme un cadeau qu’il lui a fait, Sidney. En plus de lui offrir une interview exclusive, il va lui faire connaître ce qu’est une vie dans la richesse du Nord. « Vous vous souvenez de la première personne que vous avez volé ? » Le blond tape la cendre de sa cancerette dans un cendrier se trouvant sur sa gauche. « Cet homme que vous avez appelé mon père. » L’homme face à lui semble choqué. « Vous n’avez jamais eu de remords à voler votre père ? » Sidney se redresse et vient poser ses coudes sur ses genoux. Fixant intensément le jeune homme en face de lui. « Parce qu’il n’a jamais été mon père. Vous l’avez qualifié ainsi ! Pour moi, il n’était que l’homme qui m’a permis de quitter cet orphelinat plus tôt que prévu. Alors oui, ce jour où il a levé la main sur moi parce qu’il était déçu que je ne sois pas ce qu’il attendait. Je lui ai pris tout ce qu’il lui rester, jusqu’à voir tout les zéros s’afficher sur son bras. S’il m’avait simplement laissé partir, il aurait pu profiter de ce temps qu’il lui restait. Mais les choses ne se sont pas passées comme il l’aurait sûrement souhaité. » Il hausse simplement les épaules en venant s’avachir à nouveau dans son siège, écrasant ce qu’il restait de sa cigarette. « Et donc, vous avez simplement continué ensuite ? » Le blond lève les bras de chaque côté et les laisse retomber lourdement. « Comme vous pouvez le voir en effet. » Il se demande pourquoi il doit expliquer cette partie-là de sa vie, étend donné que c’est la plus connue. « Et si vous nous parliez un peu de Lili ? » Sidney sourit et son visage ce radoucis aussitôt. Lili, sa Lili. Qu’il aime parler d’elle. Ce souvenir de la toute première fois où il a posé ses yeux sur elle. « C’était il y a dix ans dans la Souna. Dès l’instant où j’ai posé mes yeux sur elle, il n’y a plus eu qu’elle. Elle était si belle, si pure… » Il rêvasse et en aurait presque une érection s’il n’était pas entouré que de testostérone à cet instant. Pas que ce soit le genre de chose qui le mette réellement mal à l’aise. Pas non plus comme si tout les gars autour de lui l’ont déjà coupé une fois en plein ébat ou pendant qu’il se faisait tailler une petite gâterie. Et l’inverse est réciproque. La plupart de ses gars sont comme des frères pour Sidney. C’est ça lorsqu’on est suffisamment proche de lui et qu’on entre dans son cercle intime. Chez lui, il n’y a pas de tabou en quelque sorte. Sauf pour ce grain galet là. Mais il a bien sur fait faire des recherches sur lui avant de le faire entrer ici. « Je savais dès l’instant où j’ai posé mes yeux sur elle que j’la sortirais de cette merde. Peu importe les moyens que je devrais utiliser, peu importe le temps qu’il me faudrait pour l’apprivoiser… preuve en est qu’aujourd’hui, j’pense qu’elle est plutôt contente d’être là où elle est. Et j’suis peut-être un vieux comme certains dise, mais j’suis loin d’être de la vieille école. J’la laisse faire s’qu’elle veut du moment qu’elle s’épanouis en tant que femme et pas uniquement en tant que celle qui pend au bras de Sidney MacGowann ! » Et ce point était un point très important pour lui. Parce que selon lui, qu’on soit un homme ou une femme, il était important d’être avant tout un individu et pas simplement vivre dans l’ombre d’un autre. C’était valable pour tous ceux autour de lui d’ailleurs, chacun avait son propre nom. Ils étaient connus grâce à ce business qu’ils avaient monté ensemble, même si la tête pensante depuis le début, c’était Sidney. « Vous n’avez jamais pensé que jeter votre dévolu sur elle alors qu’elle était si jeune, ca a pu être un fardeau pour elle au vu de votre réputation ? » Il inspire une grande gorgée d’air et fixe un point invisible au plafond. Il réfléchit à la question, voilà une question qu’il ne s’est jamais posée. « J’sais pas, je ne pense pas. Après, je ne suis pas elle, si vous voulez vraiment une réponse à cette question et qu’elle accepte de vous parler, je peux la faire venir pour que vous lui demandiez vous-même si vous voulez ? » Sidney fixe l’homme face a lui qui semble rester sur sa faim de cette réponse, bien qu'il mime un non de la tête. Mais il l’a toujours dit, il n’aime pas parler au nom des autres et encore moins en celui de sa belle qu’il tente de protéger au maximum. Parce qu’il ne serait que l’ombre de ce qu’il est si elle n’était pas là, à l’aider, à tenir. Voilà une question qu’il pourra lui poser le soir venu, lorsqu’ils seront à l’abri du monde et des regards. Car il en est curieux, de savoir l’impact qu’il a réellement sur sa vie. Est-ce qu’il la rend réellement heureuse ? Il s’en inquiète bien plus que de savoir s’il est lui-même heureux. « Mon estomac m’indique qu’il n’est pas loin de l’heure de manger, pas vous ? Venez donc, j’vous invite pour le déjeuner. Reprenons une pause et nous reprendrons tout cela plus tard si vous le voulez bien. » C’est ainsi, qu’il l’immergeait encore un peu plus dans les mystères de son quotidien, de sa vie, de son business…